Court-Circuit - Une exposition
de La Labomedia - 20 - 30 juin 2022

Court-circuit

Une exposition organisée par La Labomedia dans le cadre des Human Tech Days 2022

Du 20 au 30 juin 2022 - Le 108, Orléans

Dans cette exposition utopique auto‑prophétique, nous rendons visible une diversité de technologies qui nous interpellent et nous rappellent que ces dernières peuvent être aimables, appropriées à nos contextes et à nos besoins divers, et ré-appropriables de diverses manières selon les publics et les espèces à qui elles s’adressent.

Des technologies souvent développées en circuit court qui court-circuitent nos imaginaires sur les technologies.

Face à la monoculture numérique des technologies fast-food (Google, Amazon, Meta, Apple, Microsoft et consorts) que l’on nous oblige à consommer à l’école, au travail, dans nos familles, il est bon de se rappeler qu’il existe aussi une technodiversité produite dans des circuits courts et composée de technologies de pointe, artisanales, ancestrales, lentes, de proximité, régionales, décroissantes, non contaminantes, sophistiquées, de basse intensité.

Un chatoiement de saveurs, couleurs et matières qui stimule nos imaginaires et qui, tout à la fois, répond à nos besoins communs de façons inhabituelles, nous permet de voyager dans le temps et l’espace et de documenter nos façons de faire et nos mémoires collectives, ou encore nous permet d’exp(l)oser ce qui est difficilement visible ou ce que l’on voudrait soustraire à notre regard et à notre réflexion critique.

La créativité, l’à-propos et la durabilité sont des valeurs qui ont toujours primées au sein des technologies développées par nos ancêtres et nos grands-parents. De nos jours, elles continuent à être implémentées au travers de détournements inventifs ou de créations nouvelles, elles pimentent nos vies quotidiennes dans leurs aspects aussi bien ordinaires qu’extra-ordinaires. Elles se trouvent tout autour de nous, ici et là-bas : il suffit de lever la tête du smartphone et contempler un peu l’horizon pour commencer à les voir pointer le bout de leur nez.

Cette exposition est une invitation à traverser le miroir et vous projeter dans des futurs possibles où les technologies seraient à nouveau nos amies, au service du bien vivre ensemble, entre humain·es et autres espèces. Les personnes, collectifs et communautés qui les développent construisent les infrastructures technologiques dont elles ont besoin et le font en pensant à leur impact et à leurs conséquences, depuis la chaîne d’extraction des minéraux, jusqu’à leur production, réparabilité et fin de vie.

Vous y percevrez des mondes qui se connectent grâce au spectre électromagnétique, ces ondes qui vibrent tout autour de nous et font partie de nos biens communs, et vous vous surprendrez à rêver d’autres scénarios quotidiens possibles dans lesquels…

Les petits émetteurs d’ondes ouvertes nous permettent d’écouter les étoiles, et quand nous nous levons le matin, le smartphone ne dort plus à nos côtés. Nous ne sommes plus traversé·es par des ondes wifi et du 5G partout où nous nous trouvons.

Les technologies et applications diverses ne fonctionnent plus comme comme des mouchards, ni comme des dispositif de surveillance qui envoient des informations sur ce que nous faisons à des entreprises et gouvernements qui veulent nous vendre des trucs, ou nous surveiller pour mieux nous punir.

La machine à café et le réfrigérateur sont libres de l’internet des objets et les applications connectées ont disparu car on limite l’extraction incontrôlée des minéraux rares.

Sur la table de la cuisine, il y a une tablette fabriquée pour durer toute une vie : elle est facilement réparable et sa consommation est réduite. Toutes les pages web ont un design frugal, on consomme des vidéos en ligne seulement de temps en temps et en bonne compagnie. Tous les dispositifs sont chiffrés par défaut et proviennent d’une usine locale située à quelques kilomètres de là.

Il n’y a pas si longtemps, des biohackeur·euses ont popularisé l’usage de bactéries et d’oligo-éléments pour stocker de l’information numérique. D’autres ont produit des technologies douces pour renouer nos liens avec les insectes et permettre que la biodiversité soit recréée là ou elle avait été durement touchée. La loi de Moore a été brisée. L’obsolescence programmée a été interdite. Les cycles de guerres, de famines et d’injustices générés par l’extraction des ressources minières, tout comme la production massive de technologies, ont peu à peu disparu.

A l’école, à l’usine, à l’hôpital, au travail et à Pôle emploi, des cercles d’appropriation politique et citoyenne des technologies sont organisés, on y débat de ce qui fait sens, il est redevenu normal de se poser des questions au sujet des technologies que l’on est censé utiliser pour informer, communiquer, documenter, maintenir des liens.

La figure de l’expert·e ne pollue plus les imaginaires, les technologies sont appropriées entre pairs et tout le monde reconnaît être expert·e de sa propre utilisation et maintenance des ces dernières.

Nous sommes capables de configurer notre propre agent algorithmique pour qu’il partage nos données uniquement avec qui nous le souhaitons. Les ami·es de nos am·ies forment un réseau de réseaux de confiance et d’affinités ; les idées, les ressources et les besoins se couvrent souvent entre tous·tes. Les maisons vides sont réhabilitées, les espaces abandonnés deviennent des potagers, les surplus circulent.

Il est vrai que ces nouveaux styles de vie nous font passer de longs moments loin de l’écran, nous ne sommes plus connecté·es en permanence car plus personne ne donne trop d’importance aux technologies, en ligne ou en face à face. Celles-ci sont revenues à la place qu’elles n’auraient jamais dû quitter, à savoir des dispositifs, des techniques, des idées matérielles censées améliorer notre quotidien, sans foutre en l’air celui des autres.

Crédits

Conception et commissariat : Morgan Bodart et La Labomedia
Direction artistique : Benjamin Cadon
Production : Julie Chaintron
Scénographie : Philippe Coudert et Olivier Morvan
Régie technique : La Labomedia
Textes d’exposition : Spideralex
Communication : Olivier Morvan
Remerciements : Alex et Essun pour leur aide précieuse dans la formulation et formalisation de Court circuit, gaziel pour les 78 supports de cartes, Jo pour la version off-line de l'Index et le prêt de sa Boîte rose, Ursula pour la couture et les tartines, Thomas et la Médiathèque d'Orléans pour le prêt des vitrines, Manu pour la mise en place du micro-serveur, Simon, Thomas, Claire, Myriam, Ségo, Olivier, Benjamin, Simon et Ghislaine pour leurs coups de main très utiles et nécessaires, Oscar pour les coups de pouce online et IRL, Lydie pour son accompagnement de toujours, Julie pour son aide précieuse, Benjamin pour ses conseils, Matthieu pour les tours en ville, le 108 pour la peinture blanche, Samy pour les lampes et à tous·tes nos artistes pour leur aide et leur confiance

Ecosec, gérer les excréments avec des toilettes sèches portables

Ecosec

Toilettes construites avec des matériaux recyclables, biodégradables et non polluants, projet initié en 2018

Les toilettes sèches sont une alternative aux toilettes conventionnelles et encouragent la gestion intégrée et circulaire des déchets, en transformant ces derniers en ressources. Optimisés, ces toilettes sont composées d’un compartiment récupérateur d’urine, afin de traiter séparément urine et fèces : l’urine peut alors être utilisée diluée pour fertiliser les jardins et potagers. Autrefois, elle pouvait aussi être utilisée comme mordant textile par les teinturier·es. Les fèces nécessitent quant à eux un compostage long, mais s’ils sont bien traités, ils peuvent permettre à des zones où l’accès à l’eau est difficile et ténu, d’offrir un meilleur bénéfice aux populations, tout en les préservant des maladies qui trouvent un terrains propice dans les déjections, sans crainte de contaminer les sources d’eau potable.

Biographie

Développé par Isard, ce projet œuvre à la diffusion et la location de toilettes écologiques sèches portables pour les festivals et les événements. Développé en collaboration avec Calafou*. Projet ouvert à la participation de tous·tes celleux qui souhaitent collaborer.

Index et ressources

Calafou : Colonie éco-industrielle post-capitaliste basée en Catalogne et foyer de projets hackeurs en tous genres
https://calafou.org

Impressions végétales, renouer avec des techniques ancestrales

ISINA - Marie Longhi

Typons de sérigraphie (impressions sur rhodoïd), tissus de seconde-main sérigraphiés et encres végétales réalisées à base de noix de galle, 2022

La noix de galle est une « excroissance » du chêne : ce dernier est piqué par un insecte qui y pond son rejeton et l’arbre y réagit en créant une boursouflure qui entoure l’œuf, protégeant l’insecte. Une fois celui-ci à maturité, il va s’en échapper en créant un petit trou, visible à l’oeil nu ; la « noix » s’assombrit ensuite, elle est bonne à être cueillie ! La noix de galle, qui n’est donc pas une noix, est un bel exemple de symbiose inter-espèce.

En laissant macérer les noix récoltées dans du sulfate de fer pendant une semaine, les imprimeur·euses, enlumineur·euses et les teinturier·es obtenaient une très belle couleur noire. C’est le tanin, présent en forte quantité dans la « noix » qui nous permet cet usage.

Biographie

L’association ISINA (Institut Supérieur des Impressions Naturelles Appliquées) a pour but de valoriser l’impression manuelle et les plantes tinctoriales via des ateliers de pratiques, des commissions de travail et des semaines scientifiques thématiques. Cet institut est ouvert à tous·tes praticien·nes et/ou simples curieux·ses.

Index et ressources

http://www.helloasso.com/associations/isina
http://www.instagram.com/isina.asso/

Edition web-to-print, envisager le futur de l’ordinateur… dans le papier

Jessy Asselineau

Site web, imprimante, papier, massicot, 2022

Dans une logique d’économie de ressources, nous avons choisi de ne pas imprimer de livret d’exposition, mais plutôt de laisser au public le choix de le faire ou non. Il est possible d’imprimer chaque projet de cette exposition depuis le site web, en appuyant sur le bouton imprimante dans le menu : il suffira de plier le papier pour emporter sa petite édition low-tech. A chacun·e de décider ce qu’iel souhaite emporter à l’issue de sa visite. Vous pouvez tous les collectionner ou choisir vos préférés !

Ce projet est une exploration littérale des allers-retours possibles entre l’écran et le papier. Rendu possible grâce à la technologie du web-to-print, qui permet à un site web de s’adapter au support papier, elle en facilite la prise en main et le confort de lecture. La mise en page et l’édition proposées à l’impression ont été programmées par le développeur du site web.

Biographie

Jessy Asselineau est graphiste et bricoleur numérique. Etudiant-chercheur au sein de l’unité de recherche EMD (Edition, Media, Design) à l’ESAD Orléans (ECOLAB), son travail de recherche explore les nouvelles manières de performer le récit que le numérique rend possible, à travers des technologies diverses qui vont du web jusqu’à la réalité augmentée. Il s’implique également auprès des publics en créant des outils d’expression et de médiation tangibles et numériques au sein du collectif orléanais On participe, dans une démarche de création partagée.
https:/instagram.com/jessyasselineau

Projet Bidon, transporter des données sensibles au fil de l’eau

Chico et Roberta - La labomedia

Des fûts de bière vides, plateforme PVC, du bois, une bache et des disques durs, 2015

Transport de données lent, ultrasécurisé, non énergivore. Le voyage eu lieu en septembre 2015 au départ d’Orléans et descendit la Loire jusqu’à Nantes. Le radeau emporta aussi à bord Fifi 1er (un sound system autonome) car chaque soirée passée sur les berges doit être une fête, et une pirate box (pour recueillir et diffuser des données tout au long du trajet), des données informatiques allégales, des leaks* en quantité, deux facilitateurs.

La solution apportée au transport sécurisé de données prône la lenteur, l’aventure humaine, utilise la force de la gravité (de l’eau s’écoulant de sa source à la mer) et répond aussi a ce besoin psychologique de base qu’est l’anonymat et l’échappée à la surveillance de la techno-structure capitaliste

Biographie

Chico et Roberta souhaitent garder l’anonymat car il est au cœur du projet. Ces 2 enfants, après avoir popularisé la musique foro issue du brésil pour le compte d’une marque de soda, voulurent en faire de même pour le radeau et le rêve de liberté qu’il véhicule. Simplicité, bricolage, cabane flottante, voyage presque immobile, feu de camp, bivouac sur des îles, rapport direct à la nature, chemin alternatif aux routes goudronnées, aux rails, sans panneaux de signalisation. Arrivés en France, un peu perdu dans la grisaille, ils furent placés dans une famille d’accueil à la Labomedia. La découverte du monde numérique et de ses faces les moins reluisantes leur donnèrent l’envie de chercher les espaces de liberté et d’en créer de nouveau.
https://projet-bidons.labomedia.org/
Projet sous license CC-BY-SA

Index et ressources

Leaks : cet anglicisme signifie en français « fuite » et désigne plus spécifiquement une fuite d’information, par exemple : Wikileaks, depuis 2006 ; Offshore Leaks, depuis 2013 ; Luxembourg Leaks, en 2014 ; Football Leaks, en 2016 et 2018…

Micro-serveur web du futur, servir des contenus en ligne

FuturÉtic

Ordinateur recyclé ou une Raspberry Pi, 2022

Le micro-serveur web du futur est un serveur web frugal*. Sans connexion internet, il reste consultable hors ligne (ce qu’on appelle « en local ») via le point Wi-Fi qu’il propose. Connecté à internet, il délivre des pages web “normalement” via le réseau. Sa configuration est optimisée pour consommer le moins d’énergie possible et il pourrait être branché à un petit panneau solaire ou une mini-éolienne dans les zones non reliées au réseau électrique. Il est susceptible de s’éteindre s’il ne dispose plus d’énergie, en contrepoint aux datacenters qui garantissent un fonctionnement (un « uptime ») 24h/24 et 7 jours sur 7. Il utilise un système d’exploitation et des logiciels libres ou open source* permettant de le modifier à l’envie. Il incarne en partie l’utopie décentralisée des débuts de l’internet où chaque “client” était aussi « serveur ». Il embarque un serveur web léger et invite au développement de sites web statiques, c’est à dire qui ne sont pas re-calculés à chaque consultation. L’optimisation du code et des médias embarqués (images, sons, vidéos) permet d’obtenir des pages web qui se chargent rapidement et nécessitent peu de ressources pour s’afficher. Il contribue à démystifier le fonctionnement du web en démontrant que chacune peut mettre en place un tel serveur pour un budget réduit et avec des connaissances largement répandues et partagées.

Biographie

FuturEtic propose des outils en ligne libres, éthiques, décentralisés, respectueux de vos données et de votre vie privée et offre une alternative aux GAFAM. Activé en réponse au confinement de novembre 2020, FuturEtic s’adresse en premier lieu aux structures de la région Centre-Val de Loire mais est ouvert à tous·tes. Ces services sont proposés gratuitement et à terme dans un modèle économique solidaire pour en assurer la pérennité. FuturEtic offre des services de communication audio/vidéo en direct, d’édition collaborative et de gestion d’événement
Page ressource: https://ressources.labomedia.org/atelier_serveur_web_ecolowtech
Projet sous license CC-BY-SA
https://futuretic.fr/

Index et ressources

Web frugal : on entend par frugale une page web dont les méthodes et techniques de conception sont pensées pour réduire la consommation d’énergie d’un site web. Cela peut impliquer l’abandon de langages de programmation qui nécessitent des dialogues continus avec des banques de données externes (tel Javascript, animations, etc) et de préparer les contenus (images, par exemple) de sorte à être les plus légers possibles (compression, indexation des couleurs, format, etc).
http://site.sarahgarcin.com/web-frugal/

Open source : s’applique aux logiciels (et s’étend maintenant aux œuvres de l’esprit) dont la licence respecte les critères de libre redistribution, d’accès au code source et de création de travaux dérivés. Mis à la disposition du grand public, ce code source est généralement le résultat d’une collaboration entre programmeur·euses.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Open_source

Plantage d’ordinateur, recycler un dispositif obsoléte

La Labomedia - Philippe Coudert

Ordinateur recyclé, un vieux Windows, une plante, 2014

L’ordinateur a planté. Ou plutôt : on a planté l’ordinateur. Plutôt que la colline du fond d’écran Windows, on a préféré y accueillir un organisme vivant. Alors, oui, ça ne fait pas monter notre cote de popularité sur FaceBook. Mais peut être que le bonheur est dans le pré ici et maintenant, et pas sur Insta.

Parce qu’il est grand temps de contrebalancer les karmas délétères générés par la défaillance régulière de nos systèmes d’exploitation nous défendons une définition positive du plantage d’ordi en y faisant pousser des… misères.

Tous les humain·es qui ont chez elleux un ordinateur pourraient plus facilement accéder à la sérénité en regardant les plantes pousser plutôt qu’en se laissant aspirer le cerveau par des millions de pixels qui changent de couleur très vite.

Biographie

Labomedia place son projet d’activités à la croisée des pratiques artistiques, articulé ainsi autour d’un pôle dédié à la création artistique, à la recherche et au développement, à la diffusion, un pôle dédié à la fabrication numérique de type « FabLab », l’atelier du c01n + le Crédo, et un pôle ressource tourné vers l’accompagnement de projets, l’innovation pédagogique, et à la transmission de savoirs selon le principe des logiciels et connaissances « libres ». Ces dispositifs sont animés d’une même volonté : une appropriation critique des technologies contemporaines au profit d’une expression sensible, d’une production symbolique susceptible de fertiliser un écosystème culturel individuel et collectif dans la perspective d’abonder la logique de biens communs.
https://labomedia.org
Projet sous license CC-BY-SA

Bourdonnement, questionner le greenwashing

Collectif RAM

Plexiglass, verre soufflé, disques durs endommagés, moteurs et paraffine liquide, câbles, matières plastiques diverses, 2021

Comment demande-t-on aux insectes d’habiter la ville ? Où doivent-ils loger pour qu’on les accepte ? Le Collectif RAM s’est intéressé aux formes des hôtels à insectes et aux pièges : des objets-architectures qui, dans les deux cas, attirent les insectes. Soit pour leur demander d’y vivre soit pour les y faire mourir. La question de leur place en ville est envisagée pour observer nos demandes urbaines ; nous voulons des insectes, symboles de la bonne santé écologique d’une ville mais, en substrat, ce qui se lit à travers l’étude de ces formes c’est quels insectes désirons-nous et où les voulons-nous ? Une sélection d’espèces et de lieux se dessine.

L’installation nous projette dans un quartier miniature habité par des bugs informatiques, une matérialisation bruyante de l’indésirable. La place physique occupée par le matériel informatique, ou plus précisément la donnée est un enjeu de société tout comme les insectes pollinisateurs, et nous les désirons toujours plus efficaces, accessibles et invisibles.

Biographie

Le Collectif RAM est formé d’Alexis Règle et Mado Rodrigues. Ayant tous·tes deux reçu une formation aux arts numériques, leurs pratiques se rejoignent à travers des questionnements sur les mythes qui entourent la technologie : elle serait à la fois un remède à nos maux tout en étant jugée responsable de ces derniers. Des univers dystopiques à la perspective d’un avenir bio-technologique salvateur, les références aux nouvelles technologies habitent leurs œuvres.

Co-production : Lieu Commun - artist run space et Université Toulouse - Jean Jaurès, avec la participation de Tipii atelier (artisan souffleur de verre)

Hardware, fossiliser des technologies actuelles

Yann Leguay

Blocs de marbre gravés et sculptés à la main, 2018

Les gravures rupestres comptent parmi les plus anciennes traces de la culture humaine. La civilisation a toujours eu besoin de stocker des informations de manière durable. À l’époque de leur création, les motifs, symboles et figures gravés avaient une signification et une fonction. Aujourd’hui, on ne peut souvent que les deviner ou les décoder grâce à la connaissance du contexte historique.

Le projet Hardware de Yann Leguay est une série de pierres sculptées à la main, des rochers de différentes tailles sur lesquels sont gravés des objets et des symboles technologiques. Yann a collecté et taillé ces pierres lors de diverses résidences (Grèce, Islande), en les replaçant parfois là où il les avait collectées. Hardware produit une contradiction archéologique, confrontant les notions de temps, de technologie et de mémoire.

Biographie

A travers des sons et des objets, Yann Leguay s’intéresse aux notions de dématérialisation, à l’utilisation des interfaces et à tout ce qui touche à la matérialité de la mémoire. Dans sa pratique sonore, il a été défini comme un “saboteur de médias” par le label Consumer Waste, cherchant à replier cette matérialité sur elle-même en utilisant des moyens basiques sous forme d’objets, de musique et de performances. Il a présenté son travail dans de nombreux lieux et festivals en Europe et au-delà. Depuis 2007, il produit également des installations, des sculptures et des éditions qui intègrent une approche critique de la signification de l’évolution technologique.
https://http://www.phonotopy.org

Refonte, simuler des dispositifs préhistoriques avec des déchets électroniques

Dardex - Quentin Destieu, Sylvain Huguet

Composants électriques et électroniques récupérés et recyclés, fonderie, 2014-2015

Entre archéologie contemporaine et geste anachronique, ces armes proposent une refonte de nos sociétés industrielles, une évocation post futuriste nous rappelant la fragilité de nos systèmes et l’implication guerrière de l’humanité. Refonte brouille la lecture de futurs archéologues qui étudieront nos sociétés hypertechnologiques.

Cette série de pointes de lances et d’armes rudimentaires est réalisée à partir de différents matériaux récupérés sur des déchets d’équipements électriques et électroniques. Les déchets métalliques composées d’alliages de cuivre, d’aluminium et d’or, sont ensuite fondus puis coulés dans des moules, opérant ainsi une appropriation d’un savoir faire datant de l’Age du fer. La fonte de matériaux provenant de déchets électronique est couramment utilisée dans de nombreux pays, notamment en Afrique.

Biographie

Quentin Destieu est artiste chercheur et enseignant à l’université Aix-Marseille. Explorant les média numériques actuels et leurs effets sur le développement de nos sociétés, son travail artistique questionne un monde saturé par la technologie en jouant avec les frontières et les relations entre contre-cultures digitales et cultures populaires.

Sylvain Huguet vit et travaille entre Bruxelles et Marseille. Il développe, en collaboration avec différents artistes et chercheurs au sein du collectif Dardex, des installations et des performances multimédia, utilisant l’interactivité, le web et le jeu, interrogeant les média actuels.
https://dardex.free.fr/

Cyberfeminist index, préserver la mémoire des contributions féministes à l’étude et développement des technologies

Mindy Seu

Maintenance et informations compilées par Mindy Seu, site web développé par Angeline Meitzler, avec l’aide de Janine Rosen, Charles Broskoski et Laura Coombs, présenté sur la Boîte rose réalisé par Jo, 2020

Le cyberféminisme ne peut être réduit aux femmes et à la technologie. Il ne s’agit pas non plus de la diffusion du féminisme par la technologie. La combinaison de « cyber » et de « féminisme » se voulait un oxymore ou une provocation, une critique des cyberbabes et des fembots qui peuplaient le paysage de la science-fiction des années 1980. Le terme est autoréflexif : la technologie n’est pas seulement le sujet du cyberféminisme, mais aussi son moyen de transmission.

Il s’agit d’un projet qui documente la mémoire des féministes qui se sont attelées à analyser l’impact des technologies sur la vie des femmes, personnes LGBTIQ, minorités et de la planète terre, tentant de comprendre le potentiel libérateur ou oppresseur de chaque nouvelle technologie. Cet index documente aussi le corpus théorique décrivant le développement de technologies féministes et intersectionnelles. Démarré sous la forme d’un document tableur, le projet est devenu une base de données en ligne recevant des suggestions de contenus à y indexer, de façon collaborative : exclusivement porté sur des entrées anglo-saxonnes à ses début, l’index inclut aujourd’hui de nombreuses références latino-américaines et du monde entier.
https://cyberfeminismindex.com

HEXEN 2.0, retracer l’histoire secrète des instances de pouvoir

Suzanne Treister

Cartes de tarot, jeu de 78 cartes et cinq Historical Diagrams dessinés à l’encre Rotring, 2009-2011

HEXEN 2.0 se penche sur l’histoire de la recherche scientifique derrière les programmes gouvernementaux de contrôle de masse, en étudiant les histoires parallèles des mouvements contre-culturels et populaires. HEXEN 2.0 étudie plus particulièrement les participant·es aux conférences Macy (1946-1953), dont l’objectif premier était de jeter les bases d’une science générale du fonctionnement de l’esprit humain.

Le projet examine simultanément diverses réponses philosophiques, littéraires et politiques aux avancées technologiques, notamment les revendications de l’anarcho-primitivisme et du post-gauchisme, Theodore Kaczynski/The Unabomber, le technogianisme et le transhumanisme, et retrace les idées précurseures telles que celles de Thoreau, Warren, Heidegger et Adorno en relation avec les visions de futurs utopiques et dystopiques de la littérature et des films de science-fiction.

Biographie

Suzanne Treister est une pionnière dans le domaine du numérique/nouveaux médias/web dès le début des années 1990, réalisant des œuvres sur les technologies émergentes, développant des mondes fictifs et des organisations collaboratives internationales. Utilisant divers médias, Treister a développé un vaste corpus d’œuvres qui s’engagent dans des récits excentriques et non conventionnels via des réinterprétations fantastiques de taxonomies et d’histoires données qui examinent l’existence de forces secrètes et invisibles à l’œuvre dans le monde, qu’il s’agisse d’entreprises, de l’armée ou du paranormal.
https://suzannetreister.net

Courtesy of the artist, Annely Juda Fine Art, London and P.P.O.W. Gallery, New York

Fusil à micro-ondes, brouiller les technologies envahissantes

Dardex - Quentin Destieu

Four micro-ondes recyclé, bois, aluminium, 2018

Objet néo-luddite*, le fusil à micro-ondes est un dispositif prenant la forme d’une arme à énergie dirigée DIY, il est destiné à brouiller le fonctionnement de certaines machines électroniques se trouvant à une portée de quelques mètres ou faire cuire des oeufs avec une technique originale. Il est élaboré à partir du recyclage d’un four à micro-ondes, qu’il détourne de son utilisation ménagère traditionnelle.

Pensé comme un instrument de défense des libertés individuelles et citoyennes face à l’intrusion omniprésente des technologies actuelles au seins de nos sociétés et de nos vies, cette expérimentation questionne les dangers et les différentes pollutions résultant de l’utilisation globale, consumériste et irraisonnée de ces dernières. Il évoque une alternative et un combat à mener face à l’intrication de ces systèmes et de nos vies, à la surveillance généralisée, et aux dérives totalitaires liées aux objets du quotidien, du téléphone portable à l’écran publicitaire en passant par la caméra de surveillance jusqu’au drone militaire.

Biographie

Quentin Destieu est artiste chercheur et enseignant à l’université Aix-Marseille. Explorant les média numériques actuels et leurs effets sur le développement de nos sociétés, son travail artistique questionne un monde saturé par la technologie en jouant avec les frontières et les relations entre contre-cultures digitales et cultures populaires.
https://dardex.free.fr/

Index et ressources

Néo-luddisme : désigne une mouvance activiste d’orientation technophobe, c’est-à-dire manifestant son opposition à tout ou partie du progrès technique et se concrétisant par le parasitage, la dégradation, la destruction d’équipements ou encore des occupations de terrain, visant à empêcher la construction de grandes infrastructures jugées contraires aux valeurs et croyances diverses desdits activistes.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Néo-luddisme

Datawear.it, déjouer la surveillance généralisée avec des châles

Fieke Jansen - Marieke van Dijk

Infographies imprimées sur textile, 2020-2021

Nous constatons que si le niveau de compétence des personnes pour naviguer dans leur environnement numérique reste le même, les pratiques de surveillance invasives des entreprises et de l’État sont omniprésentes et ne cessent d’augmenter. La surveillance s’insinue dans les espaces publics grâce à l’utilisation de la reconnaissance faciale, de la détection, de l’identification vocale, de la GAIT*, de l’imagerie thermique et de la surveillance par drone. Tout cela se fait sans grand débat ni examen public.

Datawear est un projet pour stimuler la participation des citoyen.nes aux questions se posant sur les mécanismes de surveillance : qui surveille, qui est surveillé·e, où vont ces données, qui les utilise et pour quelles finalités ? Datawear offre des outils de réflexion pour pouvoir explorer et questionner collectivement le déploiement de ces nouvelles technologies dans nos espaces publics. Les châles peuvent aussi être portés afin de déjouer certains types de surveillance.

Biographie

Fieke est une chercheuse, écrivaine et formatrice sur les technologies, les droits humains, la surveillance et la justice sociale. Elle s’intéresse à la re-politisation des données et des technologies, en les situant dans leur contexte historique, social, culturel et politique.

Marieke est responsable du design stratégique chez idiotēs, une agence de recherche en design à l’heure de la complexité, du chaos et des contradictions. Elle travaille sur de nouveaux concepts pour une société plus sociale et durable.
https://www.datawear.it/
https://www.idiotes.nl/

Direction artistique : Fieke Jansen et Marieke van Dijk
Équipe : Ad Korf, Amanda Lee Gaffer, Chinouk Filique de Miranda, Daniel Maarleveld, Julia Berg, Raza Rottenberg, Sigrid Winkel and Xandra Hoek
Traduction : Spideralex + Filippi

Index et ressources

GAIT : technologie de surveillance procédant de l’identification humaine par le mouvement. Par exemble, dans une vidéo, cette technologie utilise des caractéristiques biométriques naturelles (le squelette humain, la silhouette, le changement pendant la marche) et des caractéristiques abstraites pour identifiée la personne représentée.

Récepteur d’ondes ouvert, écouter l’invisible pour tisser du lien

Shortwave Collective

Supports de tous types, fil magnétique, pinces crocodiles, crayons, câbles audio, épingles à nourrice, sardines de tente, objets personnels et enregistrements audio et vidéo, 2022

Animé par Kate Donovan et Alyssa Moxley, cet atelier a pour objectif la fabrication de « récepteurs à ondes ouvertes » (radios sans alimentation), selon une recette DIY et personnalisable développée par le collectif. Celle-ci permet flexibilité et créativité, et laisse une grande liberté de mise à la terre des radios dans un environnement spécifique.

Durant l’atelier, nous avons passé du temps à construire, expérimenter et écouter ensemble. Le lendemain soir, nous nous sommes installé·es avec nos radios sur le Duit, au centre de la Loire à Orléans, pour une expérience collective d’écoute/réception au crépuscule - moment où les conditions atmosphériques permettent la réception de fréquences plus lointaines.

Biographie

Shortwave Collective est un groupe d’artistes international et féministe créé en mai 2020, intéressé par l’utilisation créative de la radio. Le collectif se réunit régulièrement pour discuter des approches féministes de la radio amateur·rice et du spectre radioélectrique en tant que matériel artistique, en partageant des ressources, en considérant les approches DIY et les structures inclusives.

Le collectif Shortwave est composé de : Alyssa Moxley, Brigitte Hart, Franchesca Casauay, Georgia Muenster, Hannah Kemp-Welch, Kate Donovan, Lisa Hall, Maria Papadomanolaki, Sally Applin et Sasha Engelmann.
https://www.shortwavecollective.net/

Spectrogrammes, tricoter le spectre électro­magnétique

Claire Williams

Machine à tricoter, antenne radio, tricots, vidéo explicative, 2020

L’ordinateur retransmet les flux électromagnétiques captés par les antennes à une machine à tricoter. Détournée en spectrogramme, la machine à tricoter transforme les pixels traduits en 0 et 1 en points tricotés rendant palpables les variations sonores du lieu (50°36’35.7″N 3°23’34.3″E) ou la signature électromagnétique d’une éruption solaire (203° 22’ 29.86" 0° 00’ 00,00" - solar flare 12:47:05 2020-10-16 Greenland radiotelescope). Elle tricote rang par rang le spectre hertzien de ces fréquences sonores et les encode au sein même de sa matière. Un système programmé donne la possibilité à ces quatre langages (sonore, numérique, électronique et textile) de communiquer de manière autonome dans une boucle ou l’humain est exclu, rendant tangible leurs conversations mathématiques.

Biographie

Claire Williams vit à Bruxelles. De la machine à tricoter hackée jusqu’aux textiles transformés en surfaces de captations, ses œuvres s’inscrivent à la croisée des univers textiles, sonores et électroniques et cherchent à capter les multiples variations de notre spectre électromagnétique. Elle crée notamment des dispositifs alliant artisanat et électronique ou elle sculpte des composants électroniques afin de rendre visible les mouvements électromagnétiques de notre magnétosphère ou encore créer des interfaces mêlant broderie et électronique pour nous proposer un rapport tactile à des phénomènes sonores.
http://www.xxx-clairewilliams-xxx.com

NID - Nouvelle Influence Dynamique, magnifier l’infiniment petit

Chloé Jeanne

Tirages jet d’encre pigmentaire sur rc satiné photo premium infinity canson 310g
Solutions saturées et billes de verre, macrophotographies, 2022

Ces macrophotographies illustrent les solidifications de différents composants chimiques entrés en réaction. Les liquides saturés de sulfate de cuivre, de sel, de sucre, de soufre et d’acide citrique se figent, cristallisent, cohabitent sur un seul et même support, le verre. Le temps de la cristallisation les matières premières s’apprivoisent et se positionnent, les formes se font et se défont. Les cristaux deviennent alors les témoins des changements de température et de luminosité.

Biographie

Chloé Jeanne, familière de l’exploration du vivant et des organismes silencieux qui le composent développe un travail de recherche et de création, au croisement des arts, des sciences et du design. En convoquant régulièrement bio-matériaux ou entités biologiques elle génère des formes nouvelles, un vocabulaire plastique sensible et sensoriel qui lui permet de construire de nouveaux récits. Avec ce travail au plus proche de la matière, l’artiste dessine une œuvre intime qui fait le liant entre les êtres et les espaces et nous dévoile ce qui nous apparait comme une nouvelle relation au monde et aux êtres qui nous entourent.
https://chloejeanne.net/

Capsule rhizomique*, parcourir de nouvelles relations diplomatiques avec celleux qui nous entourent

Diane Trouillet & Annlor Codina

Coussins, aquariums, bec bunsen, bactéries, théière et sirops, champignons, plantes, chien, humaines, 2022

Après une première résidence à La Labomedia en septembre 2021, à l’occasion du festival éco-féministe Réinventer son Monde, nous avons choisi de continuer à tisser ces liens en proposant à Diane et Annlor d’investir de nouveau le 108 pour clotûrer Court circuit.

L’installation est un cercle dans lequel le public est invité à nous rejoindre. Lieu alchimique de rassemblement et d’ateliers, il devient un territoire pour l’expérimentation, un lieu où nous inventons sans hiérarchie et mettons en partage les process, les protocoles, les recettes, les constructions d’outils et leurs détournements, l’échange et les débats, la communication entre vivants d’espèces différentes : bactéries, champignons, plantes, chien, humain·es… Une culture de spiruline est présente dans le cercle et collabore à la réalisation d’images. Des expériences de remédiation (phytoremédiation, mycoremédiation) tenteront de guérir les sols pollués. Nous prendrons soin du vivant hors de nous, en nous et à travers nous…

Biographie

Après une thèse en Biologie cellulaire et moléculaire, Diane Trouillet explore en tant qu’artiste chercheuse, l’interface entre la Science, l’Art et les techniques. Elle questionne la place du vivant dans notre société et la construction de l’image face à la propagande de l’innovation. En développant ses propres médiums vivants, elle expérimente d’autres supports artistiques. Les formes résultantes convoquent l’art éphémère, et travaillent par elles-­mêmes, se transforment de façon aléatoire et échappent au contrôle.
https://www.un-artist.com/

Annlor Codina élabore des stratégies de résistance poétique. En court-circuitant les archétypes militaro-sécuritaires et financiers, elle crée de nouveaux territoires ludiques et festifs. Collaborant avec le végétal, elle mène des projets de hacking politique au long cours : tel A®bor(e)tum où elle explore les propriétés abortives des plantes, ou Line, dont l’objet est de décontaminer une parcelle agricole de la bande de Gaza malmenée.
http://annlorcodina.com/

Index et ressources

Rhizome : le rhizome est la tige souterraine et parfois subaquatique remplie de réserve alimentaire de certaines plantes vivaces. Comme les racines, il contribue au décolmatage naturel du sol, voire à la fixation et stabilisation durable des berges ou de certaines zones vaseuses ou des dunes. Il nourrit certaines espèces souterraines capables de le consommer. S’il meurt, il enrichit le sol en matière organique.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Rhizome
Le concept de rhizome — développé par Gilles Deleuze et Félix Guattari — désigne une structure évoluant en permanence, dans toutes les directions horizontales, et dénuée de niveaux. Cette structure s’oppose à la hiérarchie en pyramide.